Dans ce livre-ci, c’est de la Syrie d’hier qu’il s’agit :
d’un énorme barrage, construit pour le succès, et dont le lac en amont engloutit des vallées des villages des enfances ;
d’un style au compte goutte comme sa montée des eaux, un petit à petit qui grignote les phrases et les rivages comme mon émotion.
Oh bien sûr, son héros poète peut voguer en barque sur cette mer intérieure, ou plonger dans ses eaux pour tenter de retrouver l’histoire le passé les souvenirs, cet immense tout, lacustre désormais.
Mais comme je suis troublé de lire ce texte aujourd’hui, en ces temps de séisme là-bas, nouvel effondrement sur tant de déchirures et de guerre et de sang, avec ses résurgences de perversions humaines, sournoises comme les eaux du barrage qui se glissent partout.
Car la grande beauté de cette lecture ne cesse de hurler sa douleur et ma honte.
Sa douleur de poète qui écrit et porte l’inaudible voix d’un peuple raviné de conflits.
Ma honte de lecteur éloigné des décombres, celles d’hier comme celles d’aujourd’hui, et qui ne peut que relayer, petit penaud pleurant, la puissance de ce livre pour espérer que soit apaisée la Syrie de demain.