Si Rome meurt – Renaud Rodier – Anne Carrière

Si Rome meurt – Renaud Rodier

Dans les années 2020 en Italie, duo de parents, trio d’ados, quartet de clodos sur fond d’hymne néofasciste : bienvenue dans un concert de casseroles qui se tient dans un vieux cinéma au temps où les places n’étaient pas numérotées.

On est venu seul, on s’assied où on veut, ce sera au milieu, la lumière s’éteint mais ça n’empêche pas de rentrer dans le texte : il luit par la beauté de sa fragilité, Renaud Rodier hésite à nous faire croire qu’il s’agit d’un ventre de luciole plutôt que l’éclat glauque d’une issue de secours.

C’est beau, nostalgique, tragique, on a quelque peu honte d’avoir été touristes dans les ruines de Rome tant elles empestent la salle et salissent les mains qui lui tournent les pages.

Il y a tant d’émotions, de portraits attachants, de rage contenue… la quête du père prend forme, les héros nous entraînent, Paolo Sorrentino n’est jamais loin des travellings déployés dans les pages.

Alors on ne lâche rien de ce si beau chemin, on oublie le guide touristique et le trop plein de cartes postales, on sait la fin mais on avance, étonné, cœur serré.

Au bout de la séance, peut-être a-t-on compris une chose : que Rome ou le monde meurt ou que ce soit notre propre père, c’est du pareil au même.

On n’y croit pas, on pleure et on fait comme Renaud Rodier : on se remet au travail et on se promet d’accomplir chaque jour comme on peut ces petits gestes qui polissent l’espoir et font surgir la vie, même si, parfois, découragé, on lèvera les yeux au ciel, on renoncera à compter les étoiles et on s’inventera l’idée d’éternité pour tenter d’avaler la pilule, d’oublier le réel.

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